Dans un énième soupir, Emylie sortit de l'infirmerie. C'était ce genre de fille maladroite capable de se blesser de n’importe qu’elle façon : en voulant descendre des escaliers, ou alors en tentant de couper un bout de papier. Sauf que cette fois, ce n'était pas sous sa forme normale qu'elle s'était blessée et elle avait réussi à s'enfoncer une de ses grosses griffes dans le bras en s'entraînant un peu plus tôt. Mlle Nomi avait donc un étrange bandage au bras droit : heureusement qu'être maladroite pouvait lui permettre de sortir toutes sortes d'excuses.

Maintenant, elle se retrouvait à se demander qu'est-ce qu'elle pouvait faire maintenant. Elle ne savait pas, et cela lui importait peu, elle n'avait pour l'instant pas très envie de retourner au quatrième étage, dans sa chambre, en tout cas. Le sommeil ne viendrait sûrement pas à sa rencontre, et ça Emylie le savait. Une balade dans l'école, vide à cette heure-ci, lui ferait sûrement un grand bien. Elle referma donc l'infirmerie derrière elle et se mit à marcher d'une lenteur extrême dans le couloir du premier étage, fredonnant une chanson douce et lente.

Elle fit quelques pas en avant, quand le son d'une porte qui s'ouvrit à quelques mètres d'elle la mit en alerte. Emylie fronça légèrement les sourcils, et continua d'avancer jusque la cuisine de la cafétéria car c'était de là que provenait le bruit. À la porte, elle vit apparaître une silhouette à la longue chevelure. Un air gourmand se laissait apparaître sur son visage : la personne qui semblait être une jeune demoiselle avait avec elle de la nourriture, bien qu'elle n'arrivait pas vraiment à assimiler ce que c'était dans ce noir.

« Hm, bonsoir ? » souffla-t-elle.

Sur ces mots, elle réfléchit. Était-ce quelqu'un qu'elle connaissait ? La lumière de la lune et des étoiles lui permettait d'éclairer légèrement son chemin, mais pas de voir distinctement la personne qui lui faisait face.

Lorsque la fille devant elle se retourna, Emylie la reconnut aussitôt. Elle n'arrivait pas à mettre un nom sur son visage, retenir les prénoms des gens avait toujours été compliqué pour elle. Et lorsque celle-ci se décida à parler, cela ne put qu'affirmer ce qu'elle pensait : c'était bien elle. Elle l'avait rapidement vu, il y a quelques temps.

« J'peux savoir c'que tu fous dans les couloirs à cette heure-ci ? C'est vachement tard. » avait donc dit la jeune fille qui lui faisait face.

Bien sûr, elle continuait de manger son repas, après avoir préciser pourquoi elle était ici à cette heure-ci — étrangement tard, il faut l'avouer. Sans réfléchir à une quelconque excuse, elle énuméra sa réponse en tentant de rester le plus calme possible. Il ne fallait pas qu'elle gaffe en disant quelque chose d'étrange à propos de sa blessure.

« Pour ma part, je viens de l'infirmerie. Je me suis ouverte en tombant dans les escaliers. » Elle lâche un rire timide. « Il a fallu que je désinfecte et cache tout ça, c'était pas beau à voir. »

Elle posa lentement sa main sur le bandage qui cachait sa blessure, un peu gênée de devoir mentir. Dans tous les cas, elle était obligée : interdiction de révéler l'existence des mutants, peu importe la personne à qui elle s'adressait.

Quand sa main vint se plaquer sur sa bouche, surprise, elle faillit lâcher un cri. Par chance, rien n'était sortit de sa bouche, d'autant plus que dans tous les cas, le son aurait été étouffé. Une fois ses lèvres libres, elle se tortillait sur elle-même, encore plus gênée qu'auparavant. Être une fille aussi maladroite n'était pas de tout repos, et ça, les gens autour d'elle allait devoir le subir.

« Je suis tellement désoléééée. » murmura-t-elle d'une voix un peu sanglotante.

Emylie vint croiser ses mains derrière son dos, ne sachant plus du tout où poser son regard. Elle commençait à avoir peur : elle ne savait plus du tout comment réagir face à son interlocutrice, ni comment être discrète dans ce genre de situation. Elle n'était pas habituée, à vrai dire. Le pire dans tout ça, c'est qu'elle savait que la peur faisait surface en elle. Il fallait qu'elle se contrôle et qu'elle arrête d'être aussi maladroite, on ne sait pas ce qu'elle pourrait déclencher.

« Euh.. Tu veux manger un truc ? Tant qu'on est là. »

Longuement, elle réfléchit. Bien que ça n'ait aucune utilité, elle remit ses cheveux en place, comme si libérer son visage de ces mèches gênantes allait l'aider à réfléchir. Elle ne savait pas si manger l'empêcherait de dormir après, ou si justement ça l'aiderait à calmer toute crise de faim qui viendrait faire surface au moment où elle allait se glisser sous ses couettes chaudes. Emylie soupira, et posa doucement ses mains sur ses hanches.

« Franchement, ça dépend ce qu'il y a à manger. » déclara-t-elle donc.

Elle était pas difficile à ce sujet-ci, mais ses envies sont toujours en train de changer. Elle pourrait manger un gâteau au chocolat pour ensuite avoir soudainement envie d'épinards ! Et pour l'instant, elle ne savait pas trop ce qu'elle voulait manger.

Emiko lui fit alors un clin d'oeil, son visage s'étant rapproché du sien. La situation commençait à être embarrassante pour Emylie qui ne comprenait pas l'utilité d'une telle attitude, soudainement. Sa gêne se fit plus oppressante quand la fille qui lui faisait face ouvrit la bouche pour prendre la parole, mais d'une voix légèrement aguicheuse cette fois-ci. Bien évidemment, elle attrapa aussi son visage fin entre ses doigts.

« Tu veux goûter au plat du chef ? C'est moi qui régale. » avait-elle dit.

Sa langue glissa sur le coin de sa lèvre, un sourire en coin. La plus grande fit un pas en arrière, troublée. On entendit le talon de sa botte claquer contre le sol : un son qui résonna doucement entre les murs du couloir. Elle ne savait pas vraiment comment réagir, et décida donc de tout simplement lui répondre, sans faire attention à son comportement.

« Il faut savoir que.. Je n'aime pas trop le poisson. »

Emylie observait la pièce d'un œil distrait, écoutant en même temps ce que lui disait l'étrange fille. La cuisine était assez grande, pour un personnel assez bon. Chacun des objets présents étaient des choses qu'elle n'avait jamais utiliser au cours de sa vie — ce qui reste tout de même 19 ans. Elle poussa un long soupir exaspéré, tandis que la plus petite lui fit une proposition.. étrange.

« On dirait que tu connais pas cet endroit. Si tu veux.. Je peux te faire monter sur les meubles ! dit-elle, tandis qu'une lueur taquine traversait son regard.
– Que.. quoi ? »

La blessée — il ne fallait pas l'oublier, n'avait pas immédiatement compris ce qu'elle avait dit. Elle y réfléchit quelques instants, puis semblant comprendre le sous-entendu, devint rouge pivoine. Extrêmement mal à l'aise sur le coup, elle balbutia quelques bêtises incompréhensibles. Emylie reprit alors son souffle, déterminée à lui dire quelque chose de perceptible.

« Je.. commença-t-elle. Elle se mit alors à parler rapidement, les joues en feu. Je ne suis pas là pour ce genre de choses. »

Elle passa alors près de son amie, ne voulant plus la regarder en face. Elle était totalement troublée, et savoir que ça se voyait totalement la rendait encore plus confuse. Sans aucun bruit, elle se balada dans la cuisine, l'explorant d'un pe

Alors que la mutante en face d'elle rigolait, elle ne se sentait qu'encore plus mal à à l'aise. Elle vait un peu honte, malgré qu'elle ne savait pas vraiment pourquoi. Elle reposa alors son regard vers Emiko, qui était à présent en train de fouiller dans le frigo à la recherche de nourriture. Elle ne savait pas ce qu'elle allait lui faire et s'en moquait un peu, encore perturbée par les remarques gênantes de celle-ci.

« Je ne suis pas intéressée par ce genre de chose, lui dit-elle alors, un peu froide. »

Elle se trifouilla alors les mains, laissant la fille en face d'elle faire. Emylie souffla délicatement sur une mèche qui venait la déranger, après s'être mise à fixer le sol de la cuisine. Jamais elle ne l'avait trouvé aussi intéressant qu'à ce moment-là. Sur le coup, elle avait complètement oublié ce qu'elle était venue faire au premier étage avant de croiser l'autre demoiselle et d'entrer ici.

Sans le vouloir, elle avait énervé Emiko. Son ton froid n'était pas voulu, cela lui déplaisait juste qu'on lui propose ce genre de chose — elle n'y était pas vraiment habituée en réalité. La jeune femme l'avait alors menacée. Bien que la concernée ne ressentit aucune peur en entendant ces mots sortirent d'entre ses lèvres, elle avait au contraire été mal de lui avoir parler de cette façon qui n'était habituellement pas la sienne. Doucement, elle releva ses yeux bleus vers celle qui lui préparait à manger. Celle-ci avait d'ailleurs réussi à trouer le pain sous le coup de la colère.

« Désolée, murmura-t-elle. Je ne voulais pas te parler de cette façon. »

Elle posa sa main sur le plan de travail à ses côtés, et se mit à taper ses ongles contre le meuble. Son regard se rabaissa vers le sol en l'ayant vu s'acharner contre le pauvre bout de pain. La moue gênée d'Emylie d'il y a quelques secondes avaient laissé place à une expression un peu plus triste. De son autre main, elle jouait avec le tissu de sa robe.